mardi 28 janvier 2014

Traditions Malagasy et passages de richesse et de coeur

 LE KABARY

Les kabary, discours traditionnels, tiennent une place particulière dans la vie des malgaches. Il n'y a pas un événement important ( mariage, funérailles, retournement des morts, réunions politiques…) qui ne soit précédé d'un ou de plusieurs kabary, véritables joutes oratoires entre différents intervenants. Les plus importants sont ceux prononcés par les monarques et ceux des demandes en mariage qui peuvent durer des heures.Les kabary sont nés avant l'arrivée de l'écriture à Madagascar, d'où l'importance du lovantsofina (tradition orale) dans sa transmission.

Il est utilisé pour expliquer, pour persuader et pour condenser des idées. Pour permettre leur mémorisation, le mpikabary (orateur) fait appel à des expressions ou citations qui ne se confondent pas avec le langage commun mais restent toutefois assez accessibles. La qualité d'un discours se juge par la pertinence et la quantité des expressions choisies par l'orateur et c'est généralement au cours du rituel de purification, le fialan-tsiny, qu'il doit faire preuve de son habileté. Il doit se montrer à la fois enjoué, ironique et plein d'humour afin d'emporter l'adhésion de son auditoire.

Ces expressions verbales sont généralement les proverbes, les adages, les dictons. Le Malgache ne faisant pas la distinction, toutes ces expressions entrent dans la catégorie des ohabolana ou proverbes.Quelques orateurs expérimentés font parfois appel aux hain-teny (science de la parole, art du dialogue poétique) dans les kabary de demande en mariage. Art de l'éloquence par excellence, sa pratique était jusqu'ici réservée aux hommes. Aujourd'hui, de plus en plus de femmes et de jeunes se passionnent pour le kabary….

LES HIRA GASY

Le hira gasy est un vrai spectacle comprenant :
-Le Sasitehaka : c'est un prélude d'environ 10mn , au son des tambours, et des battements de mains à l'entrée des chanteurs, des musiciens et des danseurs ;
-le Kabary : c'est le discours annonçant le début du spectacle, invitant les dames à prendre place sur la scène et introduisant le thème. Le discours dure 15 mn ;
-le Renihira : c'est le chant principal qui développe le thème du spectacle (amour, délinquance juvénile, vie en société…) ;
-le Dihy : c'est la danse. Pendant que les danseurs se déploient sur la scène, le reste de la troupe s'accroupit sur l'herbe. La danse dure 20 mn et est suivie du discours final ;
-Le Zanakira : est un spectacle de 15 mn avant que la troupe ne quitte la scène.

Nés sur les hautes terres, les " hira gasy " ou chants folkloriques se sont développés au temps du roi Andrianampoinimerina. Lors des grands travaux d'irrigation, le roi offrait un spectacle royal animé essentiellement par les chanteurs ou " Mpihira gasy ", appelés à l'époque " mpihiran'Andriana " (chanteurs du Roi). Ces " mpihira gasy ", généralement originaires d'un même village, étaient des artistes célèbres mais démunis. Ils étaient alors mal vus par les colonisateurs et l'Eglise à cause de leurs chants patriotiques.

Les spectacles de " hira gasy " attirent des foules immenses et animent les grands événements de la communauté tels la Fête nationale, les cérémonies de retournement des morts, la fête de la moisson. Les textes des " hira gasy " racontent la vie quotidienne et contiennent toujours des messages et de sages enseignements.Les chants sont plutôt humoristiques, parfois même comiques, et sont accompagnés par les instruments de musique tels que le lokanga (instrument à corde en bambou), les instruments à vent - trompettes, flûtes, saxophones-, l'accordéon, les tambours variés.

LE SAMBATRA

Le Sambatra ( circoncision groupée) est une cérémonie rituelle célébrée en hiver, de juillet à septembre selon la tradition mais aussi pour des raisons d'hygiène. Il demeure une fête importante dans les régions rurales, en particulier dans le Sud-Est de Madagascar, où il est célébré durant un mois tous les sept ans.Tous les enfants non circoncis, pendant les sept dernières années, sont réunis et amenés auprès du " Rain-jaza" (guérisseur traditionnel). Le premier Vendredi de la pleine lune. Aidés par la famille et les amis, les parents commencent à construire le " lapa " (hutte aménagée pour la circonstance).

Plusieurs jours durant, des chansons traditionnelles sont chantées et la population se livre à des danses frénétiques accompagnées d'instruments tels que l'accordéon, le " valiha " et les tambours. Des jeux et des compétitions sportives sont organisés.Le jour " J ", tôt le matin, au premier chant du coq, les jeunes gens " velondray aman-dreny " (non orphelins de père et de mère) vont aller chercher le " rano mahery " (eau sacrée) à la source sacrée. Au retour, des attaques sont simulées comme pour les empêcher de ramener l'eau sacrée dans le lapa. Si par malheur, le récipient tombe, ils seront ainsi obligés de retourner à la source. Ils doivent alors faire preuve de ruse pour pouvoir accomplir leur mission.L'eau sacrée est accueillie au lapa par les familles qui clament en chœur " Zanaboromahery , manatody vato ". Alors le Rain-jaza commence son travail de circoncision en suivant scrupuleusement un rituel. Les chants et les cris des femmes masquent les pleurs et les gémissements des enfants circoncis.La circoncision terminée, les pères ou les grands-pères avalent les prépuces de leurs enfants circoncis enveloppés dans une banane ou un blanc d'œuf.La cérémonie se termine toujours par un grand festin accompagné de boissons fortes.

LE FAMADIHANA OU RETOURNEMENT DES MORTS

Partout à Madagascar l'hommage aux ancêtres est fervent. Au cœur des Hautes Terres, une cérémonie dont l'origine se situe au-delà de la mémoire des hommes se perpétue depuis les temps les plus anciens : le famadihana. Chaque année, de début juin à fin septembre, de village en village, les tombeaux sont ouverts et les vivants font danser leurs morts lors de grandes fêtes.Improprement appelé " retournement des morts ", le famadihana d'un ancêtre est organisé au minimum tous les cinq ans. La décision qui détermine l'organisation de cette cérémonie est souvent liée au surnaturel ; lors d'un rêve, par exemple, un parent défunt peut dire à l'un de ses descendants qu'il a froid.Un famadihana coûte cher (il faut offrir durant trois jours des festins à tous les parents, aux habitants du village, aux invités - plusieurs centaines de personnes -, faire venir des troupes de mpihira gasy et de vako-drazana [compagnie de musiciens]. Tous les membres de la famille qui le peuvent se cotisent. D'autres problèmes moins prosaïques relèvent de l'invisible : seuls les astrologues liés à la famille sont habilités à déterminer le jour et l'heure les plus propices à l'ouverture du tombeau.

Après exécution d'un fomba (cérémonie lors de laquelle l'avis des ancêtres est demandé, après partage de rhum entre les vivants et les morts - on en verse un peu sur le sol à cette fin), les astrologues fixent le jour et l'heure du début et de la fin des fêtes de famadihana.Le jour convenu, les tombeaux sont ouverts, les ancêtres sont enroulés dans des nattes neuves (que les femmes se partageront après la cérémonie : elles ont un pouvoir de fécondité). Les hommes les sortent du tombeau. Aussitôt, la foule des parents et amis s'empare des corps et les emporte dans une danse très rapide.La danse cesse. Les corps sont posés sur le sol et entourés par les membres de la proche famille. Les parents offrent à chaque ancêtre un suaire neuf. On glisse dans les linceuls une bouteille de rhum, une photo, des billets de banque. Ce sont les cadeaux des vivants à leurs morts. Rires et larmes, joie et tristesse se mêlent. Moment de recueillement : des mains se posent et exercent de légères pressions sur les corps emmaillotés de lambamena neufs.

On touche les ancêtres, pour leur " faire un câlin ", ou leur demander aide ou conseil en une secrète prière.Soudain, chaque groupe se redresse, les corps sont brandis à bout de bras par des dizaines de personnes, puis sont jetés en l'air, secoués, emportés dans une farandole effrénée. Les danseurs font plusieurs fois le tour du tombeau puis les ancêtres rentrent pour cinq nouvelles années de solitude dans la demeure éternelle.La journée est ponctuée de spectacles de hira gasy. Elle s'achève encore une fois par un festin et une fête où les villageois dansent toute la nuit autour des orchestres vako-drazana

L'ART FUNERAIRE CHEZ LES MAHAFALY

Dans le Grand Sud Malgache, parfois, entre les épineux, ou tout simplement au bord des routes, une construction isolée s'élève. Seules apparaissent d'abord des hampes ou des planches de bois, creusées de figures géométriques et surmontées de petites sculptures représentant un animal, un couple, un militaire en képi ou… un avion. Elles se dressent sur une amas rectangulaire de pierres dont la hauteur atteint parfois 1 mètre et qui sont couvertes de crânes et de cornes de bœuf.Il s'agit de l'un des fameux tombeaux Mahafaly dont les voyageurs sans scrupules ont souvent emporté les bois sculptés - appelé aloalo - pour en garnir quelque musée personnel. Les bucranes proviennent des bœufs du défunt dont le troupeau entier a été abattu lors de sa mort, pour nourrir les invités et pour l'accompagner dans l'au-delà. En effet, on croit ici que la vie sur terre n'est qu'un bref passage : la vraie vie est celle des morts qui doivent se présenter avec tout ce qu'ils ont acquis durant leur vie terrestre, devant leurs nouveaux pairs, les ancêtres et devant le Zanahary (le créateur). Cette croyance explique l'art et l'amour avec lequel les tombeaux, demeures définitives, sont construits. Le pays Mahafaly lui-même est du reste un des creusets de la culture ancestrale malgache

Sources : Ouvrages : "MADAGASCAR AUJOURD'HUI", "MADAGASCAR L'ILE MERE", "Madagascar fenêtres ",

PEUPLEMENT

Le peuple malgache est issu d'immigrations successives aux origines diverses. Deux chronologies déterminent la période des premiers peuplements de l'île. La tradition orale place les "Vazimba" comme les premiers habitants de l'île. Ils furent combattues par des vagues plus récentes d'immigrants Indonésiens qui occupèrent les plateaux centraux.


Après les Indonésiens et les Malayo-polynésiens, c'est au tour des Sémites et Arabes islamisés de s'installer sur les pourtours de Madagascar. Ils installent de nombreux comptoirs sur la côte nord-ouest et nord-est de Madagascar qui seront pour la plupart détruits par les navigateurs portugais dès le XVIe siècle. Certaines populations du sud-est se réclament encore de ces immigrations arabes aux traditions islamiques. (Antemoro, Antambahoaka…). Des témoignages sur l'existence de peuplements africains, originaires du Mozambique sont également révélés dès le XVIe siècle. La traite d'esclaves en provenance de l'Afrique de l'Est a été à l'origine de cette immigration. Certains de ces descendants que l'on appelle "Makoa" sont installés le long de la côte nord-ouest.

DECOUVERTE

Le premier européen à découvrir la Grande Ile sera le Portugais Diego Dias en 1500. Madagascar devient alors une escale sur la route des Indes et fait l'objet de nombreuses tentatives d'implantations européennes. Après les Portugais (XVIe siècle), c'est au tour des Hollandais (fin du XVIe siècle) et des Anglais (XVIIe siècle) d'essayer d'y établir des colonies. Les Français entreprirent la seule véritable tentative de colonisation et s'installèrent durant trente années (1642-1672) sur le site de Fort-Dauphin. Plus tard et jusqu'au XIXe siècle, grâce à de nombreux comptoirs installés le long de côte orientale, il y aura un commerce florissant entre Madagascar et l'Ile Bourbon (Ile de la Réunion) ainsi qu'avec l'Ile de France (Ile Maurice).

ROYAUMES

Au XVIIe siècle, on compte déjà de nombreux royaumes indépendants. On trouve au sud-est, les ethnies aux origines arabo-islamiques (Antambahoaka, Antemoro, Antanosy et Antesaka). Les peuplades essentiellement pastorales, telles que les Bara, les Mahafaly, Antandroy et autres Masikoro se partagent les vastes territoires du sud de l'île. A l'ouest s'étendent les immenses royaumes Sakalava du Menabe et celui du Boina, plus récent (XVIIIe siècle). Sur la côte orientale, les Betsimisaraka assoient leur autorité, alors que sur les Hautes Terres, les royaumes Betsileo mais surtout Merina étendent leur domination. La traite des esclaves favorise alors une politique d'expansion territoriale et profite à ceux qui disposent d'armes à feu. Ainsi, l'hégémonie Sakalava s'explique par le contrôle des principaux postes de traite de la côte ouest avec l'appui des commerçants Antaloatra. Le royaume Sakalava s'affaiblira à la fin du XIXe siècle en raison de querelles de successions et d'un handicap lié à l'immensité des territoires occupés par une population dispersée et nomade.

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